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Modigliani Quartett

17 Jan.'24
- 20:00

Salle Henry Le Bœuf

Igor Stravinsky (1882–1971)
Cantique (de Trois pièces pour quatuor à cordes) (1952)

Dmitri Chostakovitch (1906–1975)
Quatuor à cordes n° 3, op. 73 (1946)

  • Allegretto
  • Moderato con moto
  • Allegro non troppo
  • Adagio
  • Moderato

pause

Ludwig van Beethoven (1770–1827)
Quatuor à cordes n° 7, op. 59/1, « Razumovsky » (1805)

  • Allegro
  • Allegretto vivace e sempre scherzando
  • Adagio molto e mesto - attacca
  • "Thème Russe": Allegro

Durée: +/- 1h45

Grâce au soutien de généreux mécènes, le quatuor Modigliani a le privilège de jouer quatre magnifiques instruments italiens.

Amaury Coeytaux joue un violon de Stradivarius de 1715
Loic Rio joue un violon de Guadagnini de 1780
Laurent Marfaing joue un alto de Mariani de 1660
François Kieffer joue un violoncelle de Matteo Goffriller « ex-Warburg » de 1706.

« Si ce genre de passage a sa place dans l’art, alors la fin est proche ». Cette critique, datée de 1924 et émanant d’un ‘spécialiste’, se rapporte à quelques mesures de la deuxième des Trois Pièces pour quatuor à cordes d’Igor Stravinsky, et témoigne de la réception de ces miniatures composées en 1914. Sans doute l’écriture pour les cordes est-elle atypique: Stravinsky utilise les instruments d’une manière inhabituelle, insolite; il recherche des sonorités inouïes, ce qui explique la présence d’annotations aux interprètes telles que: « excessivement court et sec », « donnez une sonorité très fine et très douce”, « renversez vite l’instrument (tenez-le comme on tient un violoncelle) afin de pouvoir exécuter ce pizzicato qui équivaut à l’arpège renversé » – cette dernière remarque s’adressant au second violoniste et à l’altiste. Si les Trois Pièces pour quatuor à cordes ne portent pas de titre individuel, Stravinsky les a appelées Danses, Eccentric et Cantique lorsqu’en 1928, il les a orchestrées et reprises dans ses Quatre Etudes pour orchestre. Quant à la Cantique, « sorte de choral au caractère religieux auquel le titre d’Hymne aurait fort bien pu convenir », précise Stravinsky, elle annonce déjà le style des Symphonies d’instruments à vent et de la Symphonie des psaumes.

Anne Mattheeuws

 

Dernier né d’une série d’œuvres associées aux thèmes de la guerre, du mal et de la violence, le Quatuor à cordes n° 3 de Chostakovich est composé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, en 1946. Après l’avoir entendu, le pianiste Konstantin Igoumnov exprima son admiration en ces termes : « Cet homme voit et sent la vie mille fois plus profondément que tous les autres musiciens réunis. »

La partition est un chef-d’œuvre, d’un grand pouvoir émotionnel. Chostakovitch puise son inspiration dans la souffrance, qu’il transforme en un art souverain. Il explore également de nouveaux moyens d’expression. Les différents mouvements présentent d’importants contrastes dramatiques mais sont intégrés dans un ensemble homogène. À l’origine, le compositeur leur avait donné des titres évocateurs, qu’il biffa ensuite.

Le premier mouvement, initialement intitulé « Calme inconscience du futur cataclysme », est empreint de sérénité. Il énonce un premier thème d’allure innocente qui emporte les instruments dans une ronde aimable. Le second motif rappelle la Neuvième Symphonie. Il est suivi d’un Moderato con moto d’un lyrisme intense, qui portait le titre « Présages de troubles et anticipation ». Chargé de pressentiment, il évolue dans un climat d’amertume. L’Allegro non troppo, intitulé « Les forces de la guerre déchaînées », est un scherzo. Il évoque une marche vigoureuse qui débouche sur une contestation féroce. Suit une passacaille intériorisée, appelée « Hommage aux morts ». Le finale, « L’éternelle question : pourquoi ? et pour quoi ? », est un rondo bâti sur un thème dansant et un motif repris à la passacaille. Dans la coda, Adagio, le premier violon conclut sur un choral à l’unisson des trois autres instruments.

Axelle Thiry

 

Aucune oeuvre ne révèle d'une manière aussi évidente que l'op. 59 n°1 le ton radicalement nouveau adopté par Beethoven dans ses quatuors de la seconde période. Les contemporains de Beethoven furent particulièrement irrités par le deuxième mouvement. Maintes anecdotes nous le rapportent, comme celle, par exemple, sur le célèbre violoncelliste Romberg qui vit dans les répétitions d'accords une sorte de moquerie de la part du compositeur, jeta sa partition par terre et la piétina. La prédominance de l'élément rythmique, la perte de la continuité en raison d'un enchaînement d'éléments n'ayant apparemment rien en commun et, venant s'ajouter à cela, un ton touchant souvent à la parodie ou au sarcasme - autant d'éléments que l'on n'avait auparavant encore jamais entendus sous cette forme dans un quatuor à cordes. L’Allegro semble si disparate que sa forme-sonate est facilement négligée. Il en va de même dans les trois autres mouvements. Ils suivent tous ce type de forme, mais le principe du mouvement de sonate s'efface derrière d'autres éléments formels. Dans le mouvement de tête, l'omniprésence du motif introductif donne l'impression que les idées y sont associées librement; dans le troisième mouvement, nous voyons dominer le pathos d'une musique funèbre, de manière plus intense encore que dans la marcia funèbre de la Symphonie héroïque; par son thème russe, le mouvement final acquiert à certains moments le caractère d'un rondo final au caractère empreint de sérénité. Beethoven utilise à deux reprises dans les trois quatuors de l'op. 59 de tels ‘thèmes russes’; en dehors du Finale du premier quatuor, il en fait aussi usage dans le troisième mouvement du deuxième quatuor. Le rôle de ces emprunts est la plupart du temps surestimé - c'est le cas, par exemple, lorsqu'on suppose qu'avec son accompagnement en accords non modulants, le curieux début du Quatuor en fa majeur est inspiré du chant folklorique russe. Il semble que Beethoven ait à peine eu connaissance de cette pratique musicale. Il emprunta les mélodies citées au recueil de chants populaires de Pratsch et Lwow publié en 1806 - pour rendre hommage au dédicataire et commanditaire des quatuors, le comte russe Razumowsky, un mélomane en-thousiaste. Ce dernier avait tout à fait mérité la reconnaissance de Beethoven: il encourageait généreusement la pratique du quatuor à cordes, particulièrement en sa qualité de mécène du Quatuor Schuppanzigh. De 1808 à 1816, il engagea même personnellement, par contrat, cet ensemble qui était d'ailleurs le tout premier de ce genre. L'action de Razumowsky aplanit les difficultés et permit au genre intime qu'était le quatuor à cordes de se faire une place dans la vie de concerts publics - une voie que Beethoven avait fortement contribué à préparer avec les dimensions symphoniques, inhabituelles pour la musique de chambre, de son op. 59 n°1.

Armin Raab

Modigliani Quartet

“Le Quatuor Modigliani fait partie à l’évidence de la cour des grands.” Le Monde

Formé en 2003, le Quatuor Modigliani fêtera ses 20 ans en 2023.  Il s'impose parmi les quatuors les plus demandés de notre époque, invité régulier des grandes séries internationales et salles prestigieuses dans le monde entier.

En 2017, ils eurent le privilège d’être le premier quatuor à cordes à se produire dans la grande salle de l’Elbphilharmonie de Hambourg.  Depuis 2020, le quatuor assure la direction artistique du « Festival Vibre ! » qui donne lieu chaque deux ans au renommé « Concours international de quatuors à cordes de Bordeaux ».  Ils programment également les festivals de Saint-Paul de Vence ainsi que celui de musique de chambre d’Arcachon qu’ils ont créés en 2011; depuis l'automne 2023, ils enseignent la première classe de quatuor à cordes à l'École Normale de Musique de Paris Alfred Cortot.

Au cours de la saison 2023/2024, le Quatuor Modigliani se concentrera (presque) entièrement sur un grand thème : l'Italie.  La compositrice Elise Bertrand, née en 2000, a écrit une œuvre sur un thème italien à la demande du Quatuor, qui sera créée en octobre 2023 au Concertgebouw d'Amsterdam.  D'autres représentations de la pièce suivront, notamment à la Rockefeller University de New York, à la Philharmonie de Cologne, au Heidelberger Frühling, au Konserthuset de Stockholm et, bien entendu, en Italie.  En outre, le « Souvenir de Florence » de Tchaïkovski est au programme : trois concerts à Paris, Hohenems et Ludwigshafen, dont deux avec Veronika et Clemens Hagen, et un avec Marie Chilemme et Antoine Lederlin.

D'autres points forts de la saison sont une tournée au Japon en septembre 2023, où le Quatuor Modigliani jouera le Concert de Chausson avec la violoniste Sayaka Shoji et le pianiste Benjamin Grosvenor, ainsi qu'un grand projet à la Biennale de quatuors à cordes de Paris en janvier 2024 : plusieurs jeunes quatuors à cordes, comme le Leonkoro Quartett, le Barbican Quartet ou le Quatuor Arod, ont répondu à l'invitation du Quatuor Modigliani et interpréteront ensemble le quatuor à cordes de Grieg dans un arrangement pour orchestre de chambre.  En outre, le quatuor se produira notamment à Zurich, Los Angeles, Bruxelles, Cologne, Istanbul et Monaco.

Le Quatuor Modigliani poursuit une riche collaboration avec le label Mirare depuis 2008.  Ses 16 disques témoignent de son vaste répertoire (Schubert, Mozart, Haydn, Mendelssohn, Bartok...) et une douzaine de leurs parutions a obtenu de prestigieuses récompenses en France et à l'étranger (Chocs de Classica, Diapason d'or).

Leur 9eme album « Portraits » a été selectionné dans la liste des bestsellers 2019 du « Preis der deutschen Schallplattenkritik ».  En janvier 2022, le Quatuor Modigliani a publié en coffret l’intégrale des 15 quatuors à cordes de Franz Schubert, particulièrement remarquée par la presse internationale.  En avril 2022, FonoForum écrit : « Dans les crescendos abrupts, dans les conflits majeurs-mineurs en dent de scie, dans les bravades sauvages brille une intensité extraordinaire, la musique atteint parfois un point où quelque chose semble se déchirer. »

Le quatuor remercie la SPEDIDAM pour son soutien.