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Comment créons-nous en temps de crise ? Trois projets S+T+ARTS sous les projecteurs

Comment les artistes, les créatifs, mais aussi les chercheurs et les entreprises réagissent-ils au changement social ? En faisant preuve de résilience, comme nous tous au cours de ces deux dernières années. Mais cette capacité de résilience n’est pas seulement nécessaire pour affronter une crise sanitaire mondiale, elle est également essentielle aujourd’hui alors que notre monde est en profonde mutation.

En collaborant, les artistes, les chercheurs, les spécialistes des technologies identifient des solutions pour relever les défis d’aujourd’hui et de demain.  Et c’est là la raison d’être du STARTS Prize : récompenser la réflexion et la création (Thinking and Making) innovantes face aux défis présents et futurs, à travers l’art et le design, à l’aide de la technologie et au bénéfice de la société.

« […] Beaucoup [des projets] se sont intéressés aux principaux enjeux en Europe et dans le monde : l’injustice sociale et le changement climatique. Certains ont choisi de se concentrer sur notre présent, en perpétuelle mutation, les yeux pleins d’espoir. D’autres ont opté pour une approche plus journalistique et ont documenté notre présent de manière créative. », a déclaré le jury à la suite de la proclamation des prix.

Tous les deux ans, Bozar présente les projets des lauréats, des mentions spéciales et des nominations au STARTS Prize. Nous avons fait une sélection de projets pour vous permettre d’aller plus loin dans la discussion sur le Deepfake, les recherches contre le Data Warming et les pratiques de design collaboratif au sein de l’économie circulaire.

 

In Event of Moon Disaster

Halsey Burgund, Francesca Panetta

Nomination au STARTS Prize ’21


« Des tas de gens nous ont demandé, à nous les vidéastes, pourquoi notre projet (une vidéo qui entend présenter une autre réalité, celle de l’échec de l’alunissage de 1969 et d’un président Richard Nixon déplorant la perte de deux astronautes de légende) ne relevait pas en soi de la désinformation. Ne venons-nous pas alimenter ainsi les théories complotistes affirmant que l’Homme n’a jamais été sur la lune ?

©Caroline Lessire/Bozar

Nous répondons à cette question par un non catégorique. Artistes multimédias et journalistes, nous travaillons depuis une décennie dans un paysage médiatique en pleine mutation. À ce titre, nous sommes convaincus que présenter des informations comme étant fausses, dans un contexte artistique et éducatif, n’est pas de la désinformation. Au contraire, une telle démarche peut être source de renforcement de pouvoir : assister à une utilisation à ce point impressionnante, mais transparente, des nouvelles technologies peut marquer les visiteurs et les inciter à plus de prudence à l’égard de ce qu’ils verront à l’avenir. En utilisant les techniques actuelles les plus pointues et en rappelant bien que notre vidéo utilise à la fois des visuels et des fichiers audio de synthèse (du “deepfake” de bout en bout), nous voulons montrer vers où cette technologie nous entraîne – et quelles pourraient en être quelques-unes des principales conséquences. » Halsey Burgund & Francesca Panetta

©Caroline Lessire/Bozar

Lisez l’intégralité de l’interview et apprenez-en plus sur ce projet sur moondisaster.org. Regardez la vidéo How to strand astronauts on the Moon – Ars Electronica AI Lab Journey 2021 présentée lors du Festival Ars Electronica A New Digital Deal en septembre 2021, dans le cadre de l’AI Lab Journey.

The Data Garden

Grow Your Own Cloud (GYOC)

Honorary Mention

« Le rythme auquel nous consommons des données augmente de façon exponentielle. Pratiquement chacune de nos actions génère des données, de l’utilisation de nos cartes de crédit à l’envoi d’e‑mails, ce qui exige une réglementation dans ce domaine. Tous ces flux de données atterrissent dans un “cloud” invisible. Aujourd’hui, les centres de données internationaux utilisent plus d’énergie que l’ensemble du Royaume-Uni et d’ici 2025, ils utiliseront plus de 20 % de nos ressources énergétiques mondiales.

©Caroline Lessire/Bozar

Dans notre projet, nous nous posons simultanément deux questions : “Devons-nous ?” et “Pouvons-nous ?” À quoi ressemblerait le monde si toutes les entreprises de technologies agissaient de la même façon ? Notre travail soulève bien plus de questions qu’il ne propose de réponses, et nous incite ainsi à imaginer, ensemble, de meilleurs scénarios futurs pour les données. Que se passerait-il si toutes les données pouvaient être stockées dans des arbres ? Il est clair que nous en planterions bien plus ! Voilà pourquoi nous voulons nous aussi inspirer une transition qui verrait les centres de données polluants disparaître au profit de centres de données respectueux de l’environnement. Plutôt que d’abattre des arbres et de faire disparaître des espaces verts au profit d’une urbanisation galopante, nous voulons privilégier une logique de régénération et de prolifération de la nature. »  Grow Your Own Cloud

©Caroline Lessire/Bozar

Lisez l’intégralité de l’interview et apprenez-en plus sur ce projet sur https://growyourown.cloud/data-garden/. Regardez la présentation vidéo du projet.

Remix El Barrio, Food Waste Biomaterial Makers

Anastasia Pistofidou, Marion Real et The Remixers at Fab Lab Barcelona, IaaC (INT)

STARTS Prize ’21 – Grand Prix de la Collaboration innovante

« Remix el Barrio est un projet du Fab Lab Barcelona, aménagé au sein de l’Institut d’architecture de Catalogne (IAAC). Le Fab Lab Barcelona défend et encourage l’économie circulaire, la co-création et les pratiques de design distribué au sein de la communauté locale afin de développer la capacité productive d’une ville grâce à l’innovation base-sommet.

©Caroline Lessire/Bozar

Remix El Barrio est le fruit d’une collaboration avec des acteurs du quartier de Poblenou, à Barcelone. Un groupe de 12 designers locaux ont identifié, analysé et co-produit neuf solutions pour l’enlèvement et le traitement des déchets d’entreprises locales et leur transformation en nouveaux produits ou matériaux. Ils ont bénéficié ici de l’accompagnement d’Anastasia Pistofidou, responsable de la ligne de recherche sur les matériaux et les textes au Fab Lab Barcelona. Parmi les solutions ainsi co-créées, citons la fabrication d’emballages à partir de coques de café, de savon à partir d’huile de cuisson usagée, de meubles en noyaux d’olive et de tissus en écorces d’orange.

Voilà pour le projet pilote. Parallèlement à cela, Remix el Barrio est devenu un collectif, baptisé “The Remixers”. Celui-ci explore actuellement d’autres pistes pour l’application du co-design à l’économie circulaire. “Nous explorons de nouvelles pratiques qui peuvent nous aider à ne plus gaspiller notre temps et nos ressources et à agir à l’échelle locale, de façon à stimuler la circularité sociale. Nous invoquons la nécessité d’imaginer de nouveaux modèles et de nouvelles techniques pour innover en utilisant ce qu’on appelle généralement des ‘déchets’”, affirme le collectif. »

©Caroline Lessire/Bozar

Plus d’info sur le projet sur https://fablabbcn.org/projects/siscode-remix-el-barrio.
Regardez l’interview vidéo de The Remixers.

Cette année, le jury international se composait de Francesca Bria (présidente du Fonds italien pour l’innovation, professeure honoraire à l’Institute for Innovation and Public Purpose à l’UCL London, et conseillère senior auprès des Nations unies pour les villes numériques et les droits numériques), d’Alexandra Deschamps-Sonsino (autrice d’ouvrages sur les objets connectés, consultante et entrepreneuse en design industriel et en design d’interaction), Alexander Mankowsky (futurologue, chercheur au sein du groupe Daimler Mercedes-Benz Group), Nicola Triscott (doctorante, curatrice, autrice et chercheuse spécialisée dans les questions au croisement de l’art, de la science, de la technologie et de la société, et directrice de FACT, Liverpool, R.-U.), et Fumi Yamazaki (Senior Marketing Manager chez Niantic Japan, auparavant chez Google Advanced Technology and Projects).

Découvrez ici la Playlist STARTS Prize ’21.