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Sur les traces d’Omar Blondin Diop

Ne manquez pas la projection du dernier film de Vincent Meessen, Juste un mouvement, le 31 octobre à 20h, qui sera suivie d’un entretien entre le réalisateur et Djia Mambu, journaliste et critique de cinéma.

« Omar était quelqu’un qui s’interrogeait. Parce qu’il est de ceux qui pensaient que la fidélité à soi, elle est dans le mouvement ». Ces paroles, extraites de Juste un mouvement, résument très opportunément l’esprit du film de l’artiste visuel et cinéaste belge Vincent Meessen. À travers le portrait d’Omar Blondin Diop, militant et intellectuel sénégalais, le réalisateur part à la recherche du passé de cette figure emblématique du mouvement contestataire post-soixante-huitard pour mieux interroger le présent.

Qui était Omar Blondin Diop ?

Né en 1946 à Niamey, Omar Blondin Diop fait de brillantes études à Paris. Après être passé par le célèbre Lycée Louis-le-Grand, il suit les cours de la prestigieuse École normale supérieure de Saint-Cloud et développe une forte conscience politique qui se traduit par un militantisme actif au sein des mouvements de la gauche révolutionnaire, inspirés à l’époque par l’expérience de la Révolution culturelle chinoise. Son activisme lui vaut alors de figurer dans le film-culte de Jean-Luc Godard, La Chinoise (1967), où il interprétera son propre rôle dans le cadre d’une histoire regroupant des jeunes fortement influencés par la pensée de Mao. Ayant pris part à Mai 68, il poursuit ses activités révolutionnaires avant d’être expulsé de France vers le Sénégal en 1969, où il poursuivra son combat, naviguant entre situationnisme, trotskisme et maoïsme. La collusion bien connue entre le régime du président Léopold Sédar-Senghor et de la France gaullo-pompidolienne suscite bien évidemment de vives oppositions au sein des groupes sénégalais révolutionnaires de gauche, en raison notamment des fortes répressions sociales qui traversent le pays. Omar Blondin Diop sera ainsi arrêté, condamné et incarcéré dans la prison de l’île de Gorée (au large de Dakar), où il sera retrouvé sans vie en 1973, officiellement à la suite d’un suicide. Cette thèse a toujours été contestée par les grandes figures démocratiques du Sénégal et par la famille Diop, qui a récemment à nouveau réclamé que toute la lumière soit faite sur les circonstances exactes de sa mort.

Entre passé et présent

Si la référence à Godard et à son célèbre film est évidemment présente dans Juste un mouvement, comme un écho à l’œuvre de Vincent Meessen, le portrait impressionniste d’Omar Blondin Diop est savamment esquissé à partir de nombreux autres éléments. Des interviews de témoins de l’époque, des proches qui apportent leurs éclairages mais également des intervenants contemporains qui partent à la rencontre de cette figure à la fois disparue et omniprésente grâce à la marque qu’elle a laissée dans l’histoire du Sénégal. Une approche qui oscille constamment entre le documentaire et l’essai filmé, qui s’appuie sur le passé pour mieux questionner le présent. Comme à travers le rappeur sénégalais Fou malade, pour qui Omar Blondin Diop est une véritable référence emblématique de la contestation.

Fidèle à sa manière personnelle de revisiter le sens des images et des symboles, Vincent Meessen signe un film d’une grande intelligence esthétique, qui explore les effets du colonialisme sur la réalité contemporaine et pose des questions nécessaires sur la déconstruction des mémoires collectives officielles qui restent encore, en définitive, à revisiter.

 

 

Vincent Meessen, artiste visuel et cinéaste

Ayant représenté la Belgique à la 56e Biennale de Venise en 2015, Vincent Meessen a en outre exposé aux Biennales de Sāo Paulo (2021), Chicago (2019), Lubumbashi (2019), Printemps de Septembre, Toulouse (2018), Shanghai (2017) et Taipei (2016).. Ses expositions en solo ont notamment été présentées au Power Plant, Toronto (2019), à L&B. Ellen Art Gallery, Concordia University, Montréal (2018) et au Centre Pompidou (2018). Ses films ont été projetés dans de nombreux festivals et musées à travers le monde. Membre de Jubilee, une plateforme de recherche et de production artistiques, il intervient régulièrement comme conférencier dans de nombreux séminaires et écoles d’art tant en Belgique qu’à l’étranger.