Jung Bin Lim

Publié le

Une fête musicale belgo-coréenne

Rencontre avec Jung Bin Lim

Chaque année Bozar et le Centre culturel coréen se retrouvent autour d’une collaboration dans le cadre de la série de concerts Bozar Next Generation. Le 17 octobre, nous accueillons un quatuor de saxophonistes des conservatoires royaux de Bruxelles. Pour l’occasion, l’ensemble a été coaché par Jung Bin Lim, pianiste sud-coréenne, accompagnatrice des étudiants au Koninklijk Conservatorium Brussel. Rencontre avec cette musicienne passionnée et heureuse de prendre part aux célébrations des 120 ans de relations diplomatiques entre la Belgique et la Corée du Sud.

Cet article s'intègre dans le cadre de

Bozar Next Generation : 25 ans

Vous êtes née en Corée du Sud et avez étudié à Séoul, puis en Belgique. Pourquoi avoir choisi ce petit pays européen ?

Je suis arrivée en Belgique en 2015 parce que mon mari y avait une possibilité de carrière. À Bruxelles, j’avais la possibilité d’acquérir de l’expérience artistique à la fois dans la musique et dans les beaux-arts. J’ai été encouragée à suivre des études de master en piano au Koninklijk Conservatorium Brussel, où j’ai rencontré le professeur Boyan Vodenitcharov, qui m’a incitée à tirer davantage profit de mes capacités musicales.

 

De nombreux musiciens coréens viennent étudier dans les conservatoires bruxellois. Comment expliquez-vous cet attrait pour ces institutions ?

Les conservatoires royaux de Bruxelles mettent tout en œuvre pour recruter d’excellents professeurs. Les étudiants du quatuor de saxophones, par exemple, ont décidé d’étudier ici parce qu’ils souhaitaient bénéficier de l’enseignement de Vincent David, l’un des meilleurs joueurs de saxophone au monde, qui a rejoint les conservatoires royaux de Bruxelles en 2019.

 

Pourquoi les Coréens se passionnent-ils tant pour la musique classique occidentale ?

Le grand public s’intéresse à la musique classique depuis longtemps. Je pense qu’aujourd’hui, le classique occidental n’est plus réservé au public de cette partie du monde, il fait partie de la culture internationale. Il ne faut pas être Italien pour aimer la pizza ! En tant que musicienne classique, je me réjouis de cette tendance, car elle signifie que le classique touche de plus en plus de monde.

 

Et qu’en est-il des musiciens coréens ?

Je ne peux pas parler de l’intérêt des Coréens pour la musique classique sans mentionner les efforts et les réalisations de la précédente génération de musiciens, comme la célèbre violoniste Chung Kyung-Wha. Depuis, de plus en plus de musiciens coréens font leurs études à l’étranger, se produisent dans des salles prestigieuses et ont la possibilité d’enseigner. Les nombreux prix décrochés par des musiciens coréens lors d’illustres compétitions ont inspiré et encouragé la nouvelle génération. En outre, les institutions musicales coréennes ont élaboré des programmes de développement des talents qui assurent une excellente éducation aux jeunes musiciens.

 

Peut-on parler d’un « esprit coréen » dans la façon de comprendre, jouer et aborder cette musique ?

Je pense que le fait que de nombreux musiciens coréens remportent des compétitions aussi prestigieuses que le Concours Reine Élisabeth illustre bien la situation. J’aimerais citer le documentaire belge Korean Classics Generation [de Thierry Loreau, NDLR], qui répond à cette question comme suit. Premièrement, les grands concours musicaux sont le moyen le plus efficace pour les Coréens de se faire un nom sur la scène internationale. Pour eux, gagner un prix est une étape importante pour poursuivre leur carrière professionnelle en Corée, où le marché du classique est bien plus restreint qu’en Europe ou aux États-Unis. Selon moi, ce qui définit l’« esprit coréen », c’est notre passion intense, notre culture du travail, notre discipline et notre rigueur.

 

Vous coachez des étudiants en prévision de ce concert. Comment les encadrez-vous ?

Mon rôle consiste à leur donner des conseils et des avis extérieurs, ainsi qu’à les aider à avoir une vision d’ensemble de leur musique.

 

Ce type de travail est-il enrichissant ?

En tant que pianiste, je n’ai pas l’habitude de travailler avec un quatuor de saxophones. Pour pouvoir les aider de manière plus efficace, j’ai écouté de la musique pour saxophone et j’ai découvert que le son des ensembles de saxophones était incroyablement coloré et fascinant. C’était une belle occasion d’en apprendre plus sur les différents instruments et leur musique.

 

Quelles sont les principales qualités de ces jeunes musiciens ?

Ils expriment leurs idées et pensées avec confiance. Ils partagent leur avis sur la musique sans crainte, tout en respectant les différents points de vue. Ils savent communiquer et s’accorder entre eux – la plus grande qualité pour un ensemble.

 

Pourquoi le public devrait-il assister à leur concert ?

Les Variations sur un thème de Händel de Brahms ne sont pas souvent jouées en concert et le quatuor de saxophones n’est pas non plus une formation très courante. Les différents genres au programme, du romantisme de Brahms au jazz de George Gershwin, sont la garantie d’une expérience intéressante, pour tous les publics. De plus, même si de nombreux musiciens coréens étudient aux conservatoires royaux de Bruxelles, ils ont rarement la possibilité de se produire dans de si grandes salles, en particulier en Belgique. Beaucoup de musiciens, comme moi, réalisent à quel point il est précieux de pouvoir jouer devant un public. La présence du public sera un vrai cadeau pour ces jeunes musiciens et, en retour, nous donnerons le meilleur de nous-mêmes.