Camerata Salzburg & Janine Jansen

Joseph Haydn

1732-1809 

Symphonie n° 6 en ré majeur, « Le matin » (1761) (24')

• Adagio – Allegro 
• Adagio – Andante – Adagio 
• Minuet – Trio 
• Finale: Allegro 

Johann Sebastian Bach

1685-1750 

Concerto pour 2 violons en ré mineur, BWV 1043 (1718-20) (17')

• Vivace
• Largo, ma non tanto 
• Allegro 

pause

Wolfgang Amadeus Mozart

1756-1791 

Concerto pour violon n° 3 en sol majeur, KV 216 (1775) (24')

• Allegro 
• Adagio 
• Rondo: Allegro 

Joseph Haydn

Symphonie n° 7 en do majeur, « Le midi  » (1761) (26')

• Adagio – Allegro 
• Recitativo: Adagio – Allegro – Adagio 
• Adagio – Allegro – Adagio 
• Minuet – Trio  
• Finale: Allegro 

Durée :  +/- 2h

Les observateurs des tendances symphoniques

La musique symphonique au 18e siècle ? Asseyez-vous donc un instant. Si les idées de base venaient d'Italie avec Corelli et Vivaldi, les innovations arrivaient surtout de Vienne avec les compositeurs Joseph Haydn et W.A. Mozart. Le développement de la toute nouvelle symphonie et du concerto populaire suivait des tendances différentes et il est impossible de le retracer à l'aide d'un modèle unique. Les caractéristiques fondamentales du concerto baroque, telles que la ritournelle, l'alternance entre le tutti et les instruments solistes, ont donc longtemps perduré. Même dans les concertos qualifiés de typiquement « classiques » ou qui leur ont ouvert la voie.

Pour Jean-Sébastien Bach, le concerto était le summum de la musique orchestrale. Non pas le concerto grosso tel que porté à des sommets sans précédent par Haendel en Angleterre, mais le concerto d'inspiration vénitienne. Ce qui est essentiel ici, c'est que Bach entra en contact très jeune avec le magistral recueil de Vivaldi, L'estro armonico, opus 3, composé de douze concertos. À l'époque, les quatre concertos pour violon de ce volume constituaient ce qu'il y avait de plus moderne en matière de concerto. Vivaldi y opta systématiquement pour une structure en trois mouvements, à l'encontre du modèle de concerto beaucoup plus long développé par Corelli : deux mouvements rapides soutiennent un mouvement lent central. Bach reprit en grande partie ce schéma de base, avec quelques interventions mineures ici et là. Plus important encore, Vivaldi choisissait toujours une structure de ritournelle dans les mouvements rapides, avec une alternance régulière entre des passages de tutti et de solo intégrés dans une structure tonale globale. Bach reconnaissait la force et la logique d'une telle structure et l'adopta également dans son Concerto pour deux violons et orchestre en ré. Ici, Bach choisit de présenter constamment les deux violons comme un duo : plutôt que de les faire jouer l'un contre l'autre, il les oppose à l'orchestre en tant que duo. (Archives Bozar, d’après Diederik Verstraete)

Joseph Haydn, lui non plus, ne put éviter l'influence de Vivaldi dans l'exploration des formes symphoniques, mais il suivit également les chemins parcourus par Haendel et Corelli. La trilogie de symphonies que Haydn composa en 1761 offre une symbiose d'inspirations et un présage aux quelque 40 symphonies que Haydn écrira au cours de la même décennie. La trilogie, qui commence avec la Symphonie n° 6, « Le Matin », est née à la demande du prince Paul II Anton Esterhazy, qui en aurait également suggéré le thème : trois moments de la journée. Le prince jouait lui-même de quelques instruments et séjournait à Naples, où il s'imprégnait des dernières tendances musicales. Son orchestre était donc à l’époque un groupe restreint de 13 à 15 virtuoses. Ainsi, lorsque Haydn prit ses fonctions de maître de chapelle adjoint, le jeune compositeur de 29 ans avait face à lui les meilleurs collègues que l'on puisse imaginer. Un terrain de jeu idéal où son style symphonique se développa rapidement.

Dans cette première composition pour Esterhazy, Haydn voulait plaire à la fois au prince et à l'ensemble. Les trois symphonies sont caractérisées par des passages solistes pour les cordes, les bois et les cuivres, comme dans un concerto grosso italien. Une réussite ! La Sixième Symphonie s'ouvre sur une douce aurore, et c'est le seul moment où l'on surprend Haydn avec une intention programmatique. Dans l'Allegro, la flûte et le hautbois se voient immédiatement confier un rôle de soliste, repris par le violon et le violoncelle dans l'Adagio qui suit. Cette section fait presque penser à un concerto miniature pour violon, les autres cordes jouant un rôle d'accompagnement. Dans le trio, la contrebasse (violone) jouit d'une liberté virtuose alors qu'elle est normalement limitée à l'accompagnement. Haydn balaie l'histoire de la musique en laissant l'instrument se déchaîner sur les croches. Dans le mouvement final, chaque section de l’ensemble est mise en lumière un court moment. Sympathique, ce Haydn !

La Symphonie n° 7, « Le Midi » suit les mêmes principes concertants. Haydn reprend une technique déjà appliquée dans ses concertos précédents, consistant à y éparpiller des miettes d'autres styles. Il commence l’œuvre par une marche cérémoniale française, qui se transforme rapidement en un Allegro festif. Et comme Bach, Haydn associe deux violons en duo. Dans le passage récitatif, Haydn fait chanter le violon avec le lyrisme d’une diva d'opéra italien, sans paroles bien sûr. La partie double aux flûtes mérite également d'être mentionnée pour les délicieuses harmonies qu’elle génère. Une fois de plus, la contrebasse brille dans le trio et tout le monde profite d’un moment de gloire dans le mouvement final. Alors, comment pensez-vous que sonnera la soirée… et la huitième symphonie ? (Guillaume De Grieve, traduit par Judith Hoorens)

Wolfgang Amadeus Mozart avait 25 ans lorsqu’il composa cinq concertos pour violon seul. Il était alors Konzertmeister de l'orchestre de Salzbourg. Le troisième de la série, le Concerto pour violon et orchestre n° 3 en sol majeur, rompt avec ses prédécesseurs par un langage formel plus libre, des contrastes remarquables et un lyrisme onctueux. Il est inventif, ludique, aventureux, tel un adolescent qui peine à se contenir tout en réalisant que l'âge adulte frappe à la porte. Cette ambiguïté apparaît dès le premier Allegro : une combinaison de galanterie séduisante et de résolution quasi militaire. Avec le début hésitant et rêveur de l'Adagio s’ouvre un nouveau chapitre. Les violons étouffés murmurent au-dessus des pizzicatos délicats des cordes graves. Le Rondo éclate à nouveau dans toute sa force vitale, mais se voit étonnamment contré par une intervention qui rappelle une sérénade, culminant à son tour dans un air folklorique enjoué. Du Mozart tout craché. À chaque fois, le compositeur parvient à éviter la prévisibilité grâce à des détails ingénieux, sans pour autant enfreindre les règles du jeu classiques. D’ailleurs, le mouvement final ne se dirige pas vers l’apothéose habituelle, qui invite tout naturellement les applaudissements, mais s'estompe dans une indécision douce et touchante. N'hésitez pas à acclamer cette série exemplaire aux multiples facettes du développement symphonique ou à continuer à la découvrir par vous-même. (Archives Bozar, d’après Sabien Van Dale)